Les perspectives

Faisant suite à ces résultats préliminaires, une nouvelle mission archéologique sera programmée en 2021. Notre objectif sera de réaliser des relevés photogrammétriques par avion pour nous permettre  de couvrir la totalité du massif de Lovo, soit près de 430 km2. À terme, nous envisageons également d’entreprendre la modélisation 3D des sites d’art rupestre, avec l’utilisation d’un laser scanner. Ces modélisations permettront aussi bien la réalisation de relevés d’images rupestres directement en 3D, que le calage dans l'espace des supports d'analyses menées sur ces sites.

Avec le Département des affaires européennes et internationales et le Centre national de préhistoire du Ministère de la Culture, nous avons initié un projet d’exposition photographique itinérante sur nos recherches dans le massif de Lovo, et ce en étroite collaboration avec l’Institut des musées nationaux du Congo. Son inauguration est prévu en 2021 au Musée national de la RD. Congo, à Kinshasa. La même année, nous souhaiterions organiser une école méthodologique à Kinshasa, dont le but sera d’initier et de former des étudiants et des chercheurs de l’Université de Kinshasa et de l’Institut des musées nationaux du Congo aux techniques de l’archéologie et de l’art rupestre.

Les premiers relevés photogrammétriques, des résultats encore inédits

Un axe de recherche, que nous avons récemment développé, a été d’intégrer les sites d’art rupestre dans le paysage archéologique au sens large, dans le but de comprendre comment ces sites rupestres s’articulent avec les autres sites archéologiques inventoriés (anciens villages, sites métallurgiques, etc.). En 2019, nous avons ainsi effectué des relevés photogrammétriques par drone. Cette technique de pointe appliquée à l’archéologie n’avait encore jamais été utilisée en RD. Congo, voire dans toute la sous-région. En amont de toutes fouilles archéologiques, l’établissement de ce référentiel photogammétrique nous permettra d’optimiser la détection de traces archéologiques dans le sol et de fournir une information sur la densité des vestiges présents sur l’ensemble du massif de Lovo. L’analyse de ces résultats est encore en cours d’étude. Mais d’ores et déjà, nous avons identifié des structures géométriques de plusieurs dizaines de mètres, qui pourraient correspondre à des sites d’habitats.

Depuis 2019, notre programme archéologique est également soutenu par le Département des affaires européennes et internationales du Ministère de la Culture.

Première monographie sur le massif de Lovo

Nous avons publié un premier bilan de nos recherches à Lovo en 2017. Ce livre est librement téléchargeable sur le site d’Archaeopress

Cette étude qui comprend 700 pages dans ses deux volumes a consisté à réaliser le premier inventaire systématique de l’art rupestre du massif de Lovo. En croisant les points de vue ethnologique, historique, archéologique et mythologique, nous avons pu montrer que l’art rupestre joue bel et bien un rôle important dans la culture kongo. Cet ensemble de résultats nous a permis d’intégrer l’art rupestre dans les pratiques rituelles kongo, en confirmant que certains aspects rituels et symboliques kongo peuvent être atribués avec assurance à l’ère préchrétienne. Notre étude a également enrichi le système décoratif kongo, en montrant que l’art rupestre participe du même système d’ornementation et qu’il est bel et bien une partie importante des vestiges de l’ancien royaume de Kongo. Au même titre que les sources historiques ou les traditions orales, il peut apporter aux historiens une documentation de premier plan et contribuer à reconstruire le passé de l’Afrique. 

Création de la mission franco-congolaise « Lovo »

En 2016, nous avons obtenu le soutien de la Commission des fouilles archéologiques françaises à l’étranger du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. 

Notre programme archéologique, codirigé par Geoffroy Heimlich et Clément Mambu Nsangathi, ambitionne de développer les recherches archéologiques en RD. Congo, en contribuant à la formation d’une nouvelle génération d’archéologues, ainsi qu’à la protection et à la valorisation de ce riche patrimoine. Il sera une pièce maîtresse pour établir une proposition d’inscription du massif de Lovo au patrimoine mondial, comme le souhaitent l’Institut des musées nationaux du Congo. L’équipe qui travaille dans cette direction regroupe actuellement onze étudiants et chercheurs congolais et français. 

Nous avons aussi étendu nos prospections vers d’autres régions, en particulier le site de Mbanza Matari, l’une des anciennes capitales provinciales du royaume de Kongo, et dont aurait dépendu le massif de Lovo. Nous avons pu précisément localiser ce site, ce qui n’avait jamais été réalisé jusque-là.

Nouveaux prélèvements, et nouvelle méthode de datation utilisée pour dater les peintures rouges

Cette année-là, une de nos priorités a été de compléter les premières datations directes de l’art rupestre du Kongo Central obtenues par la méthode du carbone 14 pour en préciser le cadre chronologique et pour mettre en évidence une tradition d’art rupestre plus ancienne, comme l’atteste l’une des datations de la grotte de Tovo remontant aux VIIe-IXe siècles. En collaboration avec le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), nous avons ainsi effectué des prélèvements pour dater par l’uranium-thorium et le radiocarbone des échantillons de calcite recouvrant des peintures rupestres, notamment des peintures géométriques rouges. Cette technique de datation n’a pour l’instant jamais été appliquée en contexte africain. Les analyses sont actuellement en cours d’étude.

Soutenance de thèse de Geoffroy Heimlich

Geoffroy Heimlich soutient sa thèse de doctorat sur l’art rupestre du massif de Lovo, à Bruxelles. Il s’agit de la première étude systématique consacrée à l’étude du massif de Lovo.

 

 

 

 

 

 

Les premières datations directes de l’art rupestre du massif de Lovo

Pour la première fois, nous avons pu effectuer des datations directes de l’art rupestre par la méthode du radiocarbone, allant du XIIIe au XVIIIe siècles, qui confirme les liens avec le royaume de Kongo et avec ses rituels, notamment le kimpasi. Au total, neuf datations directes ont pu être réalisées sur des dessins, dont huit dans la seule grotte de Tovo, ce qui est pour l’heure sans équivalent en Afrique.

La même année, nous avons eu l’occasion de visiter deux importants sites. Le premier, Songantela, est situé au pied d’une falaise. Sur près de vingt-huit mètres de long, la paroi est ornée de plus de 270 images rupestres, en grande majorité des peintures rouges. Le second site, Ngembo, est situé sur le sommet d’une montagne, sur lequel une trentaine de rochers est orné de près de 730 gravures d’un style comparable à ceux de Fwakumbi.

Les prélèvements de pigments, et les massifs ornés de Ndimbankondo et de Miangu

En collaboration avec le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF), nous avons réalisé des prélèvements de pigments picturaux sur plusieurs sites. L’analyse physico-chimique de ces échantillons nous a permis d’étudier les techniques de fabrication de la matière picturale dans le but de dater directement les dessins réalisés avec du charbon de bois. 

Les habitants de Mbanza Matadi nous ont aussi conduit cette année-là dans les massifs de Ndimbankondo et de Miangu. Le massif de Ndimankondo en particulier comprend environ 700 images rupestres sur six sites inédits, en majorité des peintures rouges. Avec le C2RMF également, notre objectif était de retrouver des résidus de liant susceptibles d’avoir conservé une quantité de carbone suffisante pour dater ces peintures rouges au carbone 14. Une seule recette de pigment rouge semble avoir été utilisée, à base d’ocre rouge, sans qu’il nous soit possible d’y identifier des restes de liant.

2010 fut également l’année, où nous avons réalisé un webdocumentaire sur nos recherches à Lovo, avec Le Monde.fr et Arte Radio, que vous pouvez consulter à cette adresse : https://www.lemonde.fr/afrique/visuel/2010/07/08/un-archeologue-au-congo_1384916_3212.html

Les traditions orales, et les grottes ornées de Tovo et de Nkamba

Les images rupestres sont étroitement liées à des traditions orales. Nos enquêtes approfondies nous ont permis cette année-là de mieux comprendre le lien entre les images rupestres, les mythes, les rituels et leurs résonances sur la vie des Kongo aujourd’hui. Sur le site de Fwakumbi, Bernard Divangambuta fut l’un des premiers d’ailleurs à nous confier l’existence d’êtres mythiques, qu’on appelle les mafulamengo, les mbwidi mbodila et les mbaka. Avec les mafulamengo et les mbwidi mbodila, les esprits locaux simbi sont réputés être les auteurs de ces images rupestres. 

Grâce à des guides chasseurs, il nous a été également donné de visiter deux importantes grottes ornées jusque-là inconnues : les grottes de Tovo et de Nkamba. La grotte ornée de Tovo en particulier traverse le massif de part en part. Dans la galerie supérieure de cette grotte prédominent les figures géométriques, à la différence de la salle d’entrée où sont figurés également des lacertiformes et des anthropomorphes.

Nos premières recherches à Lovo

Depuis le début des années 1970, plus aucune recherche de terrain n’avait été entreprise dans le massif de Lovo, jusqu’en 2007, où nous avons eu l’occasion d’en reprendre l’étude, en étroite collaboration avec l’Institut des musées nationaux du Congo, l’instance congolaise en charge de la protection du patrimoine culturel. Ces recherches de terrain ont été réalisées dans le cadre du doctorat de Geoffroy Heimlich.

L’un de nos objectifs était tout d’abord de réaliser l’inventaire le plus exhaustif possible du massif de Lovo. C’est ainsi que Bernard Divangambuta, chef coutumier, nous a conduit cette première année jusqu’au site à gravures de Fwakumbi. Au nord-ouest de Lovo, à proximité d’un ancien village et de son cimetière, dans le lit d’une rivière, à sec pendant la saison sèche, se trouvent près de 940 gravures révélant une riche séquence stylistique sur environ cinquante mètres de long.

error: Content is protected !!